Courts Métrages n°5

Le graphiquement agréable Fallen pêche un peu du côté du récit: difficile de savoir où l'auteur veut aller à la seule vision du court métrage. Electronic Performers gagne le prix du meilleur plugin de l'année; plus sérieusement, le clip est bâti autour d'une musique du groupe Air et semble représenter les impulsions nerveuses ou neuronales d'un foetus humain. Sympathique, surtout pour la musique !

Dans la catégorie humour noir, voire humour crépusculaire, on trouve tout d'abord A buck's worth. La vie d'un homme est sur le fil: soit il parvient à se procurer du café et une cigarette ce matin, soit... Je vous laisse découvrir la fin ! Fallen Art pousse le bouchon encore plus loin et n'aurait pas dépareillé dans les Idées noires de Franquin. Un général envoie ses soldats à la mort en les balançant dans le vide. A l'arrivée, un curieux personnage façon savant fou prend la photo de leur dernière pose. Celle-ci sert en fait à créer un... court métrage d'animation. Fallen Art, ou l'art de tomber avec grâce...

Concept bon, film trop long, c'est le lot de Dies irae et son assemblage de photos qui invite au voyage. D'innombrables couchers de soleil aux couloirs d'immeubles, il n'y a que vingt quatre images par seconde de différence. Lavage de cerveau assuré si passé plus de deux fois à la suite.

J'avais déjà vu Agricultural Report lors du festival des très courts mais une fois de plus, ça vaut vraiment le coup. Une vache paisse tranquillement dans son pré en écoutant la radio. Le bulletin de news arrive et est bien entendu complètement catastrophique: une histoire de vache folle, en somme... Notre ruminante préférée ne retrouve la paix qu'une fois la radio réduite au silence. Franchement, est-ce qu'il vaut mieux faire l'autruche et ignorer ce qu'il se passe ou alors prendre part au fatalisme et à la peur permanente qui émane des actualités ? Difficile de trancher !

Depuis que j'ai participé à un stage d'animation, et on ne rit pas, j'ai le plus grand respect pour les techniques d'animation difficiles telles que le sable. C'est justement comme cela que L'éléphant et les quatre aveugles a été conçu. Inspiré d'une légende indienne, on y voit donc quatre hommes aveuglent rencontrer un éléphant. Chacun touche une partie de l'éléphant et croit 'voir' une chose différente: tantôt serpent, tantôt mur de pierres, l'éléphant se transforme au gré des expériences des vieux infirmes... Il est clair que l'animation en sable est parfaite pour ce genre de récit !

J'ai gardé le meilleur pour la fin avec The Mysterious Geographic Explorations of Jasper Morello. Morello est navigateur. Son travail consiste à diriger les navires volants en des cieux inhospitaliers et parfois non répertoriés. Il doit reprendre du service alors qu'une épidémie de fièvre ravage la société et part en compagnie d'un docteur aux méthodes peu orthodoxes pour tenter de trouver une solution. En route, il rencontrera de nombreuses épreuves et apprendra que sa femme souffre de la mortelle maladie... Graphiquement proche des illustrations de Jules Verne pour les décors, utilisant des ombres portées pour les personnages, TMGEJM place la barre très haute et fait honneur au genre science-fiction / steampunk. Mon coup de coeur pour cette année !

Conférence Blue Sky (Robots) / Aardman (Wallace & Gromit)

Bien qu’ayant pris de nombreuses notes durant la conférence, je ne ferais pas une synthèse exhaustive de ce qui s’est dit mais plutôt de ce que j’ai retenu de tête. De fait, c’est beaucoup plus court…

Le premier intervenant se nomme Jerry Davis et travaille chez Blue Sky Studios (l’Âge de glace). Il nous détaille la fabrication de leur dernier film, Robots. Chris Wedge avait une vision pour ce film : une distribution de robots exclusivement, dans un monde mécanique. Un nouveau défi à relever : en effet, comment rendre un monde de métal authentique, ainsi que vivant et engageant ? Puis, quand la production commence, comment s'assurer que les personnages n'ont pas l'air mécanique ? Et l'histoire, d'ailleurs ?

Quelques 200 personnes auront été nécessaires pour donner le jour à ce long métrage. Un point frappant dans le processus de création (terme que je préfère largement à celui de fabrication !) est l’utilisation de projections test qui sont paroles d’évangile pour les producteurs, et donc par répercussion une contrainte importante pour les auteurs. S’assurer que le film fonctionne bien auprès du public, c’est bien… Chambouler le scénario pour le rendre le plus attractif possible, ça devient douteux. Une remarque pertinente du public fut d’ailleurs de mettre en avant l’uniformisation de l’animation américaine : un cercle vicieux est né entre le feedback du public, la pression des producteurs et les figures imposées aux réalisateurs. Maximiser le profit est évidemment bien plus intéressant que de proposer une vision d’auteur non biaisée…

La session continue avec le charismatique Peter Lord et aussi avec David Sproxton. Les deux réalisateurs ont fondé Aardman il y a quelques trente années. Ils nous parlent de la production de certaines de leurs dernières publicités et séries télévisées ainsi que de leurs longs métrages les plus récents, montrant par la même occasion à quel point le style mondialement connu du studio Aardman s'est aujourd'hui diversifié.

Bien que la démarche artisanale des débuts n’est plus qu’un souvenir face aux impératifs économiques de développement de la société, on sent bien toute la différence entre Blue Sky et Aardman. Ce dernier réalise de nombreux métrages pour la télévision, cadre formaté s’il en est, et se sert de cette manne pour créer des choses un peu plus audacieuses et différentes. La patte Aardman s’est certes un peu diluée avec le temps, mais la pérennité de l’entreprise et la qualité de ses réalisations n’est à priori pas en péril…

Nous avons pu voir de nombreux extraits de productions Aardman, dont les plus frappants sont pour Wallace et Gromit & the wererabbits, qui s’annonce définitivement excellent, et un film moins convaincant, Flushed Away. Réalisé en images de synthèse, les personnages ressemblent comme deux gouttes d’eau à leurs équivalents en plasticine. Peter Lord a d’ailleurs insisté sur le fait que l’animation en volumes (pâte à modeler, plasticine) et l’animation en images de synthèse sont deux aspects d’une même technique qui consiste à réfléchir en trois dimensions. Basculer de l’un à l’autre n’est donc pas très difficile et il n’est pas rare de trouver des techniciens ayant une double compétence au sein du studio.

Malheureusement, la conférence termine de manière un peu abrupte car déjà bien en retard… Je sors de la salle pour entrer voir presque immédiatement

The Legend of Alosha Popovich

Etant donné les merveilles qu’il nous a été donné de voir en longs métrages, j’avais la plus grande appréhension concernant l’ami Popovich. Par chance, le film est assez drôle si moyennement réalisé, et j’ai plutôt aimé l’histoire de ce grand gaillard pas très malin qui cherche à récupérer le trésor de son village qui a été dérobé par de redoutables brigands.

Ce n’est pas le film du siècle, ce ne sera pas le gagnant non plus, mais il permet de s’aérer un peu le cerveau ! Je me demande tout de même quel long métrage va remporter les suffrages… Sans doute Blend Tislar

Films étudiants n°4

C’est une tradition : nous assistons chaque année à une séance de projection de films étudiants dans un état de fatigue proche de la zombification, qui est évidemment idéal pour apprécier chaque oeuvre à sa juste valeur entre deux ronflements. La fatigue aidant, je ne parlerai que des courts métrages les plus marquants !

Dans une chambre d’étudiant et durant son absence, ses dessins prennent vie. Une seule idée en tête pour ces personnages : manger l’autre ! Une folle course-poursuite s’engage, avec comme guest stars E.T. et Rex le tyrannosaure. Marrant ! C’était The Microwave.

Workin’Progress est une séquence à mi-chemin entre un clip et un morceau de Fantasia. On y suit la construction d’un building par des ouvriers qui travaillent en chaîne et à la chaîne. Comme le dit si bien le prospectus : une comédie musicale urbaine rythmée par une musique frénétique.

La migration Bigoudenn porte très bien son nom et m’exempte d’explications. C’est humoristique tout en étant joliment poétique. Je citerais également Lechaiim parce que j’aime bien les vikings (mais ce n’est pas à cause de leurs moustaches). Rien à voir avec les films de gladiateurs, hein !

Terminons en beauté avec Brand Spanking, un film qui met en scène une école publique sponsorisée par le secteur privé à travers sodas, hamburgers et cigarettes. Là, c’est sûr, le message du film est fort et sans ambiguïté !