Coraline s'ennuie, et ce n'est pas peu dire. Elle a déménagé dans un vieux manoir décrépit. Ses parents passent tous deux leur temps à travailler sur ordinateur et la négligent complètement. Les voisins sont quand à eux parfaitement étranges : un vieil acrobate russe qui prépare son nouveau spectacle, et un duo de vieilles femmes qui s'accrochent encore à leur gloire passée. Exploratrice dans l'âme, Coraline découvre bientôt une porte vers un monde parallèle meilleur que l'original. A tel point que Coraline n'a plus envie de retourner chez elle ! Du moins jusqu'à ce que son 'autre mère' révèle ce qu'elle attend de sa fille adoptive: le cauchemar ne fait que commencer...

Coraline, ou un envers du miroir que n'aurait pas renié Lewis Caroll. La référence est évidente et le clin d'œil le plus appuyé concerne un personnage tout droit sorti d'Alice au Pays des Merveilles. Il faut dire que Neil Gaiman est un habitué des mondes baroques, inquiétants et faussement enfantins. Ce touche à tout a œuvré dans la bande dessinée, la littérature, la télévision et enfin le cinéma. On aura ainsi eu l'occasion de voir (ou pas) l'ovni cinématographique qu'est Mirrormask ou l'adaptation honnête de Stardust.

Cependant, c'est ici une pointure du cinéma d'animation qui s'approprie le monde de Coraline. Henry Selick n'est autre que le maître d'oeuvre de l'Etrange Noel de Monsieur Jack pour le compte de Tim Burton. Il est cette fois si seul aux commandes, mais il est évident que les univers de Burton et Gaiman ne sont finalement pas très éloignés. Coraline, comme Jack en son temps n'est définitivement pas pour les enfants. Je ne suis d'ailleurs pas certain que le film trouve son public tout de suite; il faudra certainement un peu de temps avant d'accéder au statut d'œuvre majeure pour les cinéphiles.

Le film n'est pas exempt de défaut : la narration est peu fluide, certains éléments de l'histoire sont tout juste esquissés, la fin est un peu précipitée... Un désordre créatif digne de Miyazaki et son Château Ambulant. Le récit est heureusement transcendé par l'animation. C'est sans aucun doute la plus belle animation de marionnettes qu'il m'aie été donné de voir, et ce malgré le fait que la projection était en 3 dimensions et que mon cerveau n'était pas d'accord. Visuellement, c'est absolument magnifique.

Je ne pourrais terminer cette revue sans évoquer la musique si particulière de Bruno Coulais (Le Peuple Migrateur) qui suggère la première les dangers du monde de l'autre côté. Inquiétante, étrange et décalée, c'est probablement sa partition la plus ambitieuse. La voix, instrument de prédilection de Coulais, est ici exploitée au maximum. Si j'avais des doutes en écoutant les différentes bandes annonces ils se sont trouvés bien vite balayés : l'alchimie musicale du film est des plus réussies !

Une belle réussite sur tous les tableaux donc, et un candidat sérieux pour le titre ! Et je ne dis pas ça parce que c'est ma première séance et que je suis très fan de Neil Gaiman. Non, non !